Diar El Mahçul
Boulevard Omar El Khayam à El Madania
Cité d'habitations HLM pour la ville d'Alger Fernand Pouillon a remarquablement tiré parti de la position des terrains sur lesquels la cité Diar El Mahçoul (cité de la promesse tenue) a été construite, sur la crête du plateau qui domine l'extraordinaire baie d'Alger, presque à l'aplomb du très beau Jardin d'Essai. Depuis la mer, la volumétrie de la cité avec sa tour, son belvédère, la mosquée et les jardins de la Villa des Arcades -agence et résidence de Fernand Pouillon- est une entité remarquable dans le paysage. Dans la cité elle-même, les espaces publics intérieurs, y compris dans leur pavement de sol, sont décorés, généreux, et reliés par de grands escaliers et des portiques qui offrent des vues magnifiques sur la mer, la ville et le port en contrebas. Jean-Jacques Deluz dans " Alger, chronique urbaine " (Ed. Bouchène, 2001, chap V) analyse très bien les composantes de la beauté de cette réalisation. Il met en évidence comment Fernand Pouillon fabrique les qualités élémentaires de la ville par le traitement de l'espace urbain : - dans toutes ses dimensions, dont le sol est traité comme l'une des façades, - dans son continuum : l'enchaînement sans rupture, - dans la hiérarchisation qui inclut à la fois le contraste dimensionnel et la centralité, c'est-à-dire que places, placettes, mails, portiques, passages, diversité de hauteur, tours, immeubles, etc… accompagnent la hiérarchie des espaces publics et la détermination préalable des espaces les plus importants, - dans l'équilibre des volumes, les harmonies et les contrastes, la mise en valeur des volumes par les jeux des ombres et des lumières, les matières et la composition des façades, la décoration. Notre album de photographies commence avec des vues prises depuis la Villa des Arcades sur la partie la plus spectaculaire de Diar El Mahçoul, dite " confort " à l'époque réservée aux européens, aujourd'hui partiellement en copropriété, aux espaces généreux sur la mer et aux décors " riches ". Les deux atteintes les plus importantes à son intégrité primitive résident dans la destruction de la monumentale sculpture en céramique réalisée par Jean Amado autour des balcons de la tour et dans le déplacement par les autorités algériennes dans le quartier de la Marine d'une fontaine monumentale réalisée par Louis Arnaud et située au pied de la tour (voir album d'archives): un Neptune conduisant un char mené par des chevaux bondissants. Seuls subsistent les chevaux. Les vues sur la partie " simple confort " de Diar El Mahçoul, à l'époque réservée à la population musulmane, commencent avec des vues prises depuis le large boulevard qui séparent les deux entités. Fernand Pouillon a nettement pris en compte la culture des deux populations pour qui il dessinait. Autant la cité dite " confort " fait appel aux modèles européens (la tour-clocher, la place, le mail, le portique, le monument), autant celle-ci fait appel au modèle de la casbah, d'autant plus aisément que le site est escarpé : rues, ruelles, placettes, passages étroits entre immeubles, escaliers, montées, descentes, densité importante, moins de décors de céramiques mais plus de travail des ombres et des lumières sur les façades, pas de tour mais des voûtes pour le marché. La première rangée d'immeubles renferme sept patios. Les très hauts encorbellements de bois qui enfermaient les balcons d'un immeuble tout en rythmant sa façade ont disparu. Les deux ensembles comptent respectivement quelques mille et mille cinq cents logements, un téléphérique permettant de rallier la ville basse et une mosquée (l'ancienne église) réalisés par Fernand Pouillon. Toutes les photographies de l'album ont été prises par les adhérents de l'association pendant le voyage à Alger en 2006. |